Une démocratie au rabais

Tout le monde s’affole de la montée de l’abstention, chacun se demande ou sont passés les électeurs. Curieusement personne ne prend en considération le fait qu’il n’y a plus vraiment, à part les présidentielles, de campagne électorale digne de ce nom avec suffisamment de moyens pour éclairer les électeurs sur les enjeux, les mobiliser le jour du scrutin, appeler à leur engagement et leur civisme.

Évidemment le désintérêt des électeurs que l’on vient de vivre a des causes multiples, de l’exploitation hasardeuse des sondages par les médias, qui donnait le sentiment que les jeux étaient faits d’avance, à la banalisation du rassemblement national, qui a démobilisé ses électeurs, en passant par l’ignorance de savoir à quoi sert un conseiller départemental sans oublier, bien sûr, les effets de la pandémie. Mais probablement la cause majeure reste que les campagnes électorales, en tout cas territoriales, sont devenues sans intérêt ni saveur, bientôt sans militants, uniquement numériques ou dans les médias qui n’ont ni le temps ni la mission de mobiliser les électeurs. Dès lors, la différence se fait sur l’incarnation, la prime au sortant et l’abstention différentielle qui fait gagner celui dont les électeurs sont les moins démobilisés. Pas très brillant pour une démocratie vivante.

Il est temps d’arrêter le massacre. Je ne plaide pas pour ma paroisse, n’ayant plus d’agence de communication ni d’intérêt matériel. Je m’engage avec cette passion de la vie publique qui ne m’a jamais quitté.

Que peut-on faire ?

Premier enjeu : augmenter le plafond des dépenses électorales. Comment voulez-vous qu’une liste aux élections régionales mobilise 3,4 millions d’électeurs avec un budget de campagne de 1,8 millions d’euros ? Comme la santé, la démocratie n’a pas de prix mais son expression électorale est soldée à environ 0,60€ par électeur. Serait il déraisonnable de consacrer à la communication 1 € par électeur inscrit ? Peut-on en finir, il est vrai dans un pays où le rapport à l’argent est si complexe, avec cette démagogie ambiante qui consiste à ne pas payer les élus au tarif et à toujours et partout limiter au maximum les dépenses de communication ?

Second enjeu : laisser les candidats utiliser librement la plupart des moyens de faire campagne. A partir du moment où l’on fait respecter des plafonds de dépenses crédibles, on se demande pourquoi interdire en plus l’affichage commercial ou l’achat d’annonces dans la presse notamment régionale ? L’affiche est, à l’origine, l’enfant chérie de la communication politique. A elle seule, elle signalise une élection, elle est reprise, elle fait évènement et débat. Pas comme ces pauvres affichettes dites officielles apposées parcimonieusement dans nos communes. Le créativité s’est effondrée. On doit à nouveau faire émerger des slogans, recréer l’impact qui touche le citoyen, retrouver l’émotion qui mobilise l’électeur,

En conséquence de cette liberté plus grande, il faut garantir la régularité des opérations d’autant plus que la moitié des dépenses électorales sont remboursées par l’Etat. Il convient donc d’augmenter les moyens de contrôle de la Commission Nationale des Comptes de Campagne.

En complément, nous devons moderniser ce que l’on ose encore appeler la propagande officielle, cette débauche incroyable de papiers, de bulletins de vote envoyés au domicile des électeurs et qui coûte des centaines de millions d’euros. Remplaçons les professions de foi désuètes par un guide des candidats et assurons sa promotion numérique. Multiplions considérablement les panneaux d’affichage libre. Et, sous réserve de l’égalité des citoyens, posons-nous nous la question d’appeler au volontariat les électeurs prêts à renoncer aux envois postaux au profit du numérique, les bulletins de vote restant disponibles dans les bureaux de vote. Cela pourrait créer une aile marchante du futur vote sur internet .

Enfin, il serait sage d’attribuer au Service d’Information du Gouvernement une dotation spéciale pour organiser avant chaque élection une campagne de mobilisation civique et, pour certaines consultations comme les départementales et les régionales, une campagne pédagogique sur l’organisation et les missions.

Il serait sage qu’un collectif de dirigeants et d’élus se penche sur cette question cruciale de la réanimation de nos campagnes électorales.

Thierry Saussez
Ancien délégué interministériel à la communication

La vie est belle à proportion qu’elle est féroce

Vous vous souvenez peut-être du magnifique film d’Alain Corneau « Tous les matins du monde »,  dans lequel Jean-Pierre Marielle prononce ces mots dont nous pouvons faire la devise des optimistes lucides. À l’opposé des optimistes béats, qui pensent que tout va toujours pour le mieux, nous savons que l’on ne mesure le bonheur qu’après avoir traversé des épreuves et le succès qu’en ayant aussi connu des échecs.

Le Covid 19 est féroce. Il attaque, déroute, affaiblit et tue. Et peut-être, plus encore, il crée l’effroi et l’anxiété.

Dès lors, pour garder notre équilibre, évitons de voir seulement ce qui est triste et effrayant. Orientons notre regard vers ce qui est beau, positif dans cette crise.

Nous changeons notre comportement, nous progressons dans la mise en œuvre de gestes barrières qui vont durer, nous protégeons les autres avec les masques. Nous découvrons tous ces héros du quotidien, des professionnels de santé aux hôtesses de caisse, des commerçants aux éboueurs, des personnels communaux aux bénévoles si nombreux.

Nous refaisons société autour des grandes valeurs positives.

Nous exprimons notre gratitude comme tous les soirs à 20 h. C’est un enjeu collectif qui nous relie aux autres et fait monter en nous les hormones et neuromédiateurs positifs pour créer un climat de mieux être et de sécurité.

Nous pratiquons la bienveillance qui n’est pas utopique mais réaliste. Le monde qui nous entoure est connecté, interdépendant. Nous prenons mieux conscience que sur tous les plans, nous sommes affectés par les dysfonctionnements, les crises, les difficultés de ceux qui sont menacés ou en galère, nos négligences a l’égard de la planète qui a mieux respiré durant notre confinement.

Nous développons l’engagement en délaissant la théorie de l’individu replié sur lui-même, dans un égoïsme croissant et l’abandon des solidarités les plus élémentaires. S’affirmer individuellement ne veut plus dire que l’on cesse d’être avec les autres.

Nous nous transcendons. Ce dépassement intègre évidemment la spiritualité dans sa version religieuse mais l’étend à sa dimension laïque. C’est l’idée de La belle vie qui nécessite de donner un sens à notre existence, d’accrocher notre char à une étoile, de n’être jamais aussi grand qu’en servant des causes qui nous dépassent.

Alors, bien sûr, les pessimistes rétorqueront que nous sommes toujours aussi râleurs, jamais contents, attendant toujours tout de l’Etat sauf quand on reçoit ses impôts, critiquant les pouvoirs publics quand ils en font trop…ou pas assez.

J’ai toujours été assez sceptique sur la réalité de cet oxymore tricolore : 80% des Français se déclarent plutôt heureux dans leur vie personnelle et 80% constituent collectivement le peuple le plus pessimiste du monde. Cherchons l’erreur. L’opinion sublime la confiance dans la sphère de proximité, la famille, les proches, le local. Et déprime volontairement la confiance dans l’univers collectif en en faisant le réceptacle de ses frustrations, mécontentements et revendications. Comme disait Jules Renard, ce n’est pas le tout d’aller bien, mieux vaut que les autres aillent mal. En noircissant le monde qui nous entoure, nous valorisons nos performance individuelles.

Il est possible que cette crise réduise l’écart exagéré entre satisfaction personnelle et défiance collective en nous faisant réaliser que la somme de nos bonheurs individuels est une force, que la France est une chance, notre identité, notre sentiment d’appartenance, notre fierté. À condition de continuer à dépasser ces trois ressorts négatifs de l’exagération des risques et des souffrances, de la victimisation, de la recherche de boucs émissaires. Alors nous donnerons raison à Albert Camus quand il écrivait dans le mythe de Sisyphe «  c’est au cœur de l’hiver que j’ai découvert que j’avais en moi un invincible été »

D’une crise faisons un espoir

Le dernier baromètre Sciences Po/Opinion Way accentue encore le pessimisme collectif des Français et souligne toujours le paradoxe avec leur bonheur individuel . Une grande majorité d’entre eux déclarent avoir réussi leur vie.

Depuis longtemps j’ai identifié, dans mes ouvrages et conférences, parmi les causes du pessimisme collectif des Français :

– le rapport à l’argent issu de notre tradition catholique. L’usurier était excommunié. L’argent était sale lorsqu’il n’était pas donné. D’où notre retard historique lorsque les échanges internationaux ont commencé par rapport aux pays protestants. Il a fallu attendre Jean-Paul II pour la reconnaissance de l’économie de marché. Être mal à l’aise à l’égard de l’argent conduit tout droit à la jalousie et à une sorte d’hystérie anti-fric et, plus généralement, à l’encontre de .ceux qui réussissent.

– le rapport à l’État qui tient une place considérable dans notre histoire. Un Etat dont les Français attendent qu’ils les accompagnent du berceau au cercueil mais protestent quand ils reçoivent la note, d’où une frustration permanente

J’ai également déterminé 3 grands leviers du pessimisme :

– l’exagération des risques et des souffrances qui fait perdre de vue, au profit des inclus, la situation des plus défavorisés, les personnes au-dessous du seuil de pauvreté et les chômeurs de longue durée – la victimisation qui peut conduire à ne jamais se demander pour combien on est dans une situation précaire ou difficile

– la recherche de bouc-émissaires tant il faut toujours s’en prendre à l’autre pour fuir ses propres responsabilités ou son absence de volonté

Chacun fera le lien avec l’actualité.

Les gilets jaunes incarnent un mouvement passionnant né du terrain, amplifié par les réseaux sociaux et les médias, illustrant la fraternité des ronds-points et surtout le déclassement d’une partie des classes moyennes.

Mais c’est un mouvement irresponsable face aux débordements, aux infiltrations, aux morts et blessés, aux dégâts économiques et sociaux, au recul de l’attractivité de la France, au moral de la Nation.

Il leur appartient d’inventer de nouvelles formes d’action pour conserver le meilleur de leur utilité et corriger leurs défauts de jeunesse. Certains d’entre eux militent dans ce sens. Comme disait Voltaire, « ceux qui ne croient pas en l’impossible sont priés de ne pas déranger ceux qui sont en train de le faire ».

Thierry Saussez, créateur du Printemps de l’optimisme

Happycratie
 ou une critique idéologique de « l’industrie du bonheur » (sic)

Un livre est publié qui semble critiquer la psychologie positive et dont les auteurs annoncent la couleur : «les marchands de bonheur prétendent agir pour notre bien. Nous ne devons pas les écouter ou nous nous perdrons dans une vaine obsession de nous-mêmes».

À la lecture de l’ouvrage, on mesure d’abord les impasses gigantesques que les 2 auteurs, Edgar Cabanas et Eva Illouz, font volontairement.

Impasse sur les recherches sur le cerveau qui confirment les intuitions initiales des pères de la psychologie positive et indiquent clairement que le meilleur médicament est en nous. Rien sur la plasticité de notre cerveau avec des réseaux parallèles et interconnectés. Rien sur les liens entre cerveau et muscle cardiaque qui relient émotions et pensées. Rien sur la capacité d’une seule pensée positive pour déclencher la kyrielle de neuromédiateurs et d’hormones bénéfiques et rien non plus sur la simple pensée négative qui conduit à la montée d’adrénaline, l’accélération du rythme cardiaque, de la pression artérielle et de la dilatation des bronches. Et, bien sûr, rien sur tous les petits exercices qui permettent de vérifier ces préceptes scientifiques. Se concentrer au réveil sur une chose agréable. Arriver au travail sans râler mais en partageant une bonne nouvelle. Exprimer plus souvent sa gratitude, etc.

Impasse sur les psychologues, psychiatres, pédiatres, médecins qui, de plus en plus nombreux, s’engagent, pratiquent, écrivent sur le fait que l’esprit soigne le corps et réciproquement, rien sur les bienfaits de la méditation, l’accompagnement positif des enfants et, plus généralement, des malades ou des personnes qui traversent une période difficile.

Impasse sur cette idée lumineuse et évidente que le développement d’une personne ou d’un peuple ne dépendent pas seulement de critères rationnels mais aussi du psychisme et du moral personnel ou collectif.

Impasse sur toutes les initiatives comme l’action de la Ligue des Optimistes de France, le Printemps de l’optimisme ou la France des solutions qui valorisent tous ces innovateurs, entrepreneurs, associations ou collectivités qui, partout en France, chaque jour, développent des actions d’intérêt général.

Je m’arrête là tant on pourrait compléter cette liste.

Alors, me direz-vous, pourquoi toutes ces impasses ? Pourquoi un angle si négatif et déprimant ? Pourquoi un livre à charge ?

On le comprend en 2 temps.

D’abord,  l’attaque se concentre autour de ce que les auteurs nomment le marché du bonheur, une notion plus indéfinie, plus subjective, plus personnelle que l’optimisme qui repose sur les valeurs très concrètes que nous promouvons. Quand c’est flou il y a un loup. Et cette attaque cible les États-Unis là où effectivement sévissent de nombreux gourous qui promettent aux crédules de devenir des winners, en ne comptant que sur eux- mêmes. Le contraire de notre approche sur le moi/nous, se réaliser pleinement en connexion avec les autres.
Ensuite, la révélation : l’objectif de ceux qui s’engagent pour promouvoir le bonheur et par amalgame la psychologie positive serait tout simplement de « raviver l’individualisme » pour faire de chacun «l’esclave de valeurs imposées par la révolution culturelle néolibérale ». Cela doit laisser coi, comme moi, tous nos parrains, partenaires, experts et philosophes !

Ainsi le rideau de fumée se dissout. Une charge furieuse, prétendument documentée, uniquement pour des raisons idéologiques qui nous sont totalement étrangères et qui, non seulement, n’altèrent en rien notre combat pour les valeurs positives de l’engagement, la bienveillance, la gratitude, la justice, l’exemplarité, le partage mais au contraire nous renforcent dans nos convictions.

Thierry Saussez
Vice-président exécutif de la Ligue des Optimistes de France
Créateur du printemps de l’optimisme

Je vous invite au Printemps de l’Optimisme

Pour sa 5ème édition le Printemps de l’Optimisme se développe sur un Mois !

C’est un événement unique en son genre. Il a déjà rassemblé des dizaines de milliers de participants.

En 2018, nous changeons de format. Pour démarrer à Paris et aller partout, du 23 mars au 2 mai 2018, au cœur de nos territoires, de Saint-Étienne à Marseille, de Nantes à Niort, à Clermont-Ferrand et dans bien d’autres villes.
En même temps, nous mettons en place une organisation territoriale, avec la Ligue des Optimistes de France, en désignant des délégués régionaux qui porteront au plus près du terrain nos messages.

Des messages optimistes et lucides.
Nous ne sommes pas des optimistes béats qui sont les extrémistes de l’optimisme.
Nous savons que la vie est belle à proportion qu’elle est féroce. On sait vraiment ce qu’est le bonheur quand on traverse des épreuves. Et le succès à la lumière de ses échecs.

Nous ne rêvons donc pas le monde plus beau qu’il n’est. Mais nous ne voulons pas être obsédés uniquement par ce qui est moche, triste, effrayant. En valorisant aussi ce qui est beau, positif, ce qui marche en France, les traceurs, les innovateurs, les entrepreneurs.

Les recherches sur le cerveau confirment les intuitions des fondateurs de la psychologie positive. L’esprit soigne le corps. Nous avons en nous les ressources naturelles pour éviter le stress et libérer, avec la seule force de la pensée, toute la kyrielle des hormones positives.

Le pessimisme est une démission. Respecter les autres commence par se respecter soi-même, c’est-à-dire utiliser toutes ses capacités, sans se réfugier dans les sempiternels « y’a rien à faire, c’est toujours la même chose, on n’y arrivera jamais ! ».

Le Mois de l’Optimisme débutera le vendredi 23 mars 2018 par une grande journée à Paris (à la Chambre de Commerce et d’Industrie Paris Ile de France – 27 avenue de Friedland 75008 Paris).
Les meilleurs experts et philosophes vous y attendent : Florence Servan-Schreiber, Philippe Bloch, Joël de Rosnay, Philippe Gabilliet, Ilios Kotsou, Charles Pépin, Frédéric Saldmann. Et beaucoup d’autres.
Vous profiterez également des formations les plus variées sur le développement personnel ou le bien-être au travail, ainsi que des animations phares qui font le succès de l’événement : la librairie optimiste, l’espace de l’engagement, la table de l’optimisme, les espaces sportifs, bien-être et vitalité, les espaces créatifs, le photocall des sourires, etc.

Passez une journée inoubliable et faites le plein d’enthousiasme, inscrivez-vous dès à présent :
https://www.weezevent.com/printemps-de-l-optimisme-2018 (entrée gratuite sur inscription).

Diffusez vous aussi l’optimisme.
Prenez part à cette action d’intérêt général. Faites reculer la sinistrose et la morosité. Développez l’envie d’y croire !
Partagez à votre tour des énergies positives.

Thierry Saussez
Créateur du Printemps de l’optimisme

Luc Ferry à la recherche du bonheur

Disons-le d’emblée, afin d’éviter toute équivoque: Luc Ferry est un ami. J’ai pour lui respect et admiration. Il m’a apporté, comme à beaucoup, tant de bonheur avec Qu’est ce qu’une vie réussie? que je suis décontenancé par la lecture de son dernier ouvrage 7 façons d’être heureux. Il est vrai que dans ce dernier ouvrage l’auteur est moins soucieux de «cette pluralité même des réponses qui supposent une forme de sagesse», qu’il affirmait dans la recherche d’une vie réussie.

Mais commençons, paradoxe oblige, par les points de convergence.

Luc Ferry rejette la quête du bonheur pour soi seul grâce à un travail centré sur son ego. Il est vrai que le marché de l’individu, avec ses recettes pour faire de nous des winners, prétendre que le succès ne dépend que de nous, est truffé de balivernes . Mais pas d’amalgame. Pour les optimistes, ce qui nous fait réussir c’est d’abord le regard des autres, le travail en équipe, la mise en réseau, l’intelligence sociale. À l’opposé du moi-je, c’est le moi-nous: je me réalise en connexion avec les autres.

Le philosophe en appelle constamment , à l’encontre – selon lui – des idéologies consolatrices mais funestes, à la réflexion, à la lucidité. Mais nous sommes des optimistes lucides. Les optimistes béats sont les extrémistes de l’optimisme. Nous ne rêvons pas d’un monde plus beau qu’il n’est. Nous savons que la vie est belle à proportion qu’elle est féroce. Nous affirmons que l’optimisme est d’abord nécessaire pour faire face aux épreuves de la vie. Quand ça va bien, on peut même avoir des états d’âme. C’est face à la difficulté qu’il convient plus encore de mobiliser des énergies positives. D’ailleurs c’est ce que font celles et ceux qui traversent les pires galères et se battent de toutes leurs forces pour s’en sortir.

Luc Ferry prône la pensée élargie, ouvrir les fenêtres, apprendre et créer, inventer et bâtir. Ne faut il pas pour faire tout cela, par exemple être chef d’entreprise, une bonne dose d’optimisme? Faut-il, comme le lapin pris dans les phares, rester obsédé uniquement par ce qui est moche, triste, effrayant? Une bonne hygiène de vie consiste à savoir aussi orienter son regard vers ce qui beau, positif, vers ce qui fonctionne, les créateurs, les innovateurs, les entrepreneurs, ceux qui apportent des solutions au lieu de créer des problèmes, toutes ces initiatives économiques, sociales, culturelles qui montent chaque jour du terrain et portent l’espoir.

L’auteur condamne l’ignorance crasse des réalités du passé, rejette l’idéalisation de la France d’hier pour mieux noircir celle d’aujourd’hui. Les optimistes considèrent cette nostalgie de l’âge d’or, de ce passé qui ne reviendra jamais comme une démission. Ils mettent en avant, malgré les crises, les atouts durables de la France et de la civilisation européenne.

Après cela, me direz-vous, à quelques détails près, où sont donc les points de désaccord?

La divergence centrale porte sur le fait que Luc Ferry jette le bébé de la psychologie positive avec l’eau du bain du bonheur. Il réfute du même coup toutes les avancées des recherches scientifiques, qui prouvent que pensées et émotions sont connectées dans le bon ou le mauvais sens, que nous avons en nous des ressources naturelles pour aller mieux et créer de l’entrain autour de nous. Il décourage toute personne de faire un effort sur elle-même pour éviter ce pessimisme funeste qui atteint notre moral collectif comme il gâche des chances sur le plan individuel. Pour aimer les autres, il faut se respecter soi-même à commencer par l’utilisation de toutes ses capacités personnelles.

Luc Ferry en vient même, au nom de la platitude anti-tragique, à douter de l’intérêt du jogging, de la diététique, des bienfaits du sourire et, au nom de la dimension du sens, des intentions de ceux qui militent dans un groupe ou donnent du temps à une association. Faudrait-il, pour être vraiment heureux, mépriser son corps, se laisser aller, faire la gueule? Faudrait il que l’altruisme, la bienveillance, l’engagement de ces millions de Français engagés dans le bénévolat soient incompatibles avec le fait d’en tirer aussi un accomplissement personnel?

Après avoir fait le constat des convergences et des divergences, concluons par un souhait qui s’applique aux philosophes, en général, et à Luc Ferry en particulier: un phare est fait pour donner de la lumière, non pour accompagner vers les ténèbres.

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