Une société du soin ?

Au moment où s’installe dans le débat public l’idée d’une France morose, déboussolée, enfermée dans un collectif déprimé, tétanisée par toutes les crises, voici que s’insinue la réponse possible d’une société du soin dans laquelle les sphères publique et privée se confondraient, le bon sentiment tiendrait lieu de projet, l’assistanat généralisé de politique publique et l’Etat de grand thérapeute.

J’ai déjà fait remarquer ici même le paradoxe assez spécialement français d’un « nous » collectif effectivement déprimé mais d’un « je » individuel beaucoup plus volontaire (toutes les enquêtes en attestent).

J’en veux pour nouvelle preuve la consultation de la jeunesse que le Gouvernement vient de réaliser, en partenariat avec Skyrock. Avec 250 000 réponses et 130 000 participants, autour de 333 sondages sur tous les thèmes, on trouve quelques raisons d’optimisme.

En effet, que nous disent les jeunes qui se sont exprimés librement ?

Des problèmes, oui, mais pas de renoncement.
Des critiques, certes, mais pas de rejet.
Des rêves mais pas des mirages.
Deux grandes attentes à l’égard de l’Etat :
– leur permettre de trouver de bons plans et des réponses concrètes,
– les aider à construire leur autonomie personnelle, à exprimer ce que cette génération a de plus volontaire.

Nous avons connu, voici quelques décennies, la tentation du nous collectif avec ses dérives vers le collectivisme, ses rêves de grand soir finissant en cauchemar.

Nous avons connu ensuite la tentation du repli sur soi-même, de l’individualisme, du moi-je, dominant, égoïste, au cœur sec qui rôde toujours.

La nouvelle génération peut promouvoir le moi-nous, s’accomplir individuellement dans un projet de vie qui soit respectueux des autres comme de la planète, dans une véritable communauté de destin.

C’est bien ce défi que la société tout entière doit aider la jeunesse à relever.

L’avenir de l’Europe

En 1950, Robert Schuman lançait la construction de l’Europe.

60 ans plus tard, un événement aussi considérable vient de se produire. L’Europe met en place un plan sans précédent pour faire reculer la spéculation et éviter que la crise grecque ne s’étende à d’autres pays. Préserver l’euro, c’est à cela que s’est employé, avec la réactivité et l’énergie qui le caractérisent, le Président de la République. C’est cette mobilisation qui devra être accompagnée par une action vigoureuse de lutte contre les déficits sans bien sûr casser la reprise.

Ce qui est en jeu, c’est bien le rêve des pères fondateurs de l’Europe, la paix, le marché commun, la stabilité financière qui ont fait tant de progrès en 60 ans.

La réaction des marchés, ce lundi, est positive. Les jours qui viennent diront si l’Europe a effectivement fait de cette crise un espoir.

Une dépression française

La plupart des enquêtes d’opinion nous montrent des Français au pessimisme persistant, voire amplifié. Le « nous » collectif est déprimé. Pourtant le « je » individuel est beaucoup plus volontaire : une majorité de salariés, de cadres, de patrons de PME se déclarent plutôt satisfaits de leur situation personnelle. Mais dès lors qu’on leur parle de la situation générale ou même de la façon dont ils perçoivent globalement celle des salariés, des cadres ou des patrons de PME, le tableau est beaucoup plus sombre.

La France se trouve ainsi dans une situation paradoxale. Elle a objectivement traversé la crise la plus grave de ces 50 dernières années dans des conditions moins défavorables que la plupart de ses voisins, et pourtant son moral collectif est plus atteint.

Il y a sans doute beaucoup d’explications.

Notre système de protection sociale est l’un des meilleurs du monde mais l’Etat providence qui laisse filer les déficits n’est plus finançeable nulle part. L’égalité figure au centre de notre devise nationale et rend d’autant plus insupportables les excès du système économique et financier.

Il y a aussi bien sûr le phénomène de halo de la crise. Elle obscurcit l’horizon, développe l’inquiétude, la peur du déclassement. Elle conduit même chacun, dans ses réponses aux sondages, à se mettre en conformité avec une ambiance morose. Ne pas se déclarer exonéré des effets de la crise, c’est une forme de solidarité au moins verbale avec les Français qui sont réellement les plus touchés.

Le moment viendra où il faudra bien inverser la tendance, tout faire pour la reprise, repartir de l’avant, moins épargner, consommer davantage, investir dans l’avenir… L’économie est aussi affaire de psychologie collective. Il appartient à la majorité des Français, cette fois-ci pour des raisons de solidarité active avec ceux qui sont les plus défavorisés et ont besoin de la relance, d’y prendre leur part. A l’Etat de tenir le cap : ne laisser personne au bord de la route comme on le fait pour les chômeurs en fin de droits, alléger les charges des PME pour favoriser l’investissement et l’embauche, continuer à réformer le pays (même quand les effets n’en sont pas immédiatement perceptibles) pour le mettre en situation d’une meilleure compétitivité.

Au fond d’eux-mêmes, les Français sont parfaitement conscients que cette crise est mondiale, que des efforts collectifs et individuels sont nécessaires pour s’en sortir. Là est peut-être l’essentiel : ne pas nier la crise, ne pas non plus s’enfermer dans un pessimisme qui nuira à la reprise et, surtout, porter un espoir de sortie de crise pour faire émerger un nouveau modèle de développement plus équitable et plus durable.

Les pouvoirs publics et Skyrock lancent «La Grande Consult’» | Le Figaro

Thierry Saussez, le délégué interministériel à la communication auprès du Premier ministre et directeur du Service d’information du gouvernement (SIG), est l’invité du «Buzz Média Orange-Le Figaro».

[youtube L6gawHL_2gk nolink]

Plus de 57 000 réponses déjà enregistrées sur une petite semaine. Le site La Grande Consult’, qui se présente comme «la grande consultation nationale de la nouvelle génération», démarre sur les chapeaux de roues. Cette initiative conduite par les pouvoirs publics en partenariat avec le groupe Skyrock doit permettre de faire vivre un site de sondages et d’expression directe sur tous les sujets de la nouvelle génération: études, projets professionnels, santé, environnement, argent, famille, Internet… sans oublier toutes les mesures «jeunes» du gouvernement. Les internautes de 16 à 25 ans ont aussi la possibilité, dans un espace participatif, de les commenter, de poser leurs propres questions, de donner leur avis… Deux raisons majeures expliquent ce projet: «D’une part, les jeunes sont le public le moins impacté par les campagnes de communication traditionnelles, celles du gouvernement comme celles des autres annonceurs, parce que leur pratique de consommation des médias est différente. Nous avons donc pensé qu’il fallait créer un support spécifique à la relation avec eux, souligne Thierry Saussez, ancien patron de l’agence Image et Stratégie Europe nommé il y a deux ans délégué interministériel à la communication auprès du Premier ministre et directeur du Service d’information du gouvernement (SIG). D’autre part, les enquêtes d’opinion menées auprès des jeunes montrent que le gouvernement est légitime à communiquer en leur direction particulière. Simplement, ils nous disent: ne communiquez pas avec nous comme un parent critique, sur le ton de l’injonction ou de la moralisation, mais soyez avec nous des accompagnateurs, plus des mentors». Première radio sur les moins de 25 ans et premier réseau social de blogs, la marque Skyrock offre d’entrée de jeu de la puissance à la plateforme La Grande Consult’, qui doit accueillir plus de 200 sondages. 2 millions d’euros y sont investis à parité par les pouvoirs publics et Skyrock.

Actuellement en pleine action sur le thème des retraites, le SIG a piloté 105 campagnes de communication gouvernementale en 2009, contre une soixantaine l’année précédente. La moitié de ses investissements publicitaires dans les médias – entre 100 et 145 millions d’euros nets par an – concerne la sécurité routière, la santé et l’environnement.

Principe de précaution

Pandémie grippale, tempête Xynthia, nuage de cendres dû à l’éruption du volcan islandais, le débat est permanent autour du principe de précaution.

Convenons d’abord que tout dispositif public et contraignant doit être réservé aux risques avérés. La prévention doit s’exercer autour de quelques priorités en matière de sécurité, de santé, d’environnement et, afin de lui garder sa crédibilité, ne pas être revendiquée pour tout et n’importe quoi.

J’entends et je lis (récemment encore dans le journal Le Monde sous la plume de Franck Nouchi), tous ceux qui commentent abondamment les crises a posteriori, alors que la difficulté est évidemment de les gérer pendant. Ils prétendent que l’objectif majeur pour le politique est « d’exagérer le danger de manière à éviter toute mise en cause ». C’est ignorer que le premier principe d’une gestion de crise est de maximiser la menace et de prendre en compte l’hypothèse la pire. Que n’auraient-ils dit d’ailleurs si le virus de la grippe A s’était renforcé en mutant, tout en gardant la même rapidité de transmission ? Que diraient-ils demain si une nouvelle tempête arrivait sur nos côtes sans que l’État ait pris des dispositions pour protéger la vie de nos concitoyens ?

Le deuxième principe de gestion de crise, puisqu’on gère des incertitudes (ce qui devrait inciter les commentateurs à un peu d’humilité), est de se donner des marges de manoeuvre dans la mise en oeuvre des plans d’action. Il est tout à fait évident, dans le cas de la grippe A, qu’il aurait été souhaitable d’associer d’emblée les médecins, ce qui n’a pas été possible du fait des délais de livraison des vaccins et de leur conditionnement.

Il est évident, malgré les polémiques sur le coût, que l’État doit rester mobilisé dans la perspective d’une pandémie grippale de type H5N1 qui risque un jour ou l’autre de frapper le monde. Nous n’avons pas géré en situation réelle une crise de moindre gravité pour nous trouver pris de court par une situation qui mettrait immédiatement en cause trop de vies humaines et le fonctionnement de la société.

De la même façon, il convient, après Xynthia, de protéger la vie des habitants les plus menacés, en les indemnisant bien sûr, et de le faire dans des conditions incontestables au niveau du périmètre de sécurité.

Toute la problématique d’une gestion de crise, face à un risque majeur, est donc le meilleur équilibre possible à trouver entre la maximisation de la menace et l’application de mesures justes et réalistes. On le vit encore aujourd’hui avec le nuage de cendres provenant d’Islande.

Personne n’a l’air de vraiment contester les mesures de précaution. Mais après coup viendront, comme toujours, les premières critiques : fallait-il vraiment en faire autant ? Certains vols n’ont-ils pas été exagérément annulés, le coût économique est-il vraiment justifié par rapport à ce gros nuage qui n’a fait que passer, etc…

Peut être au fond, compte tenu de tous les éléments que je viens de décrire, l’État est-il condamné à être accusé soit de ne pas en faire assez comme lors de la canicule, soit d’en faire trop comme pour la grippe A.

À choisir entre les deux, je laisse à chacun le soin de dire ce qu’il préfère.

1 23 24 25 26 27 31  Scroll to top